Aragon Navarre, les grands monastères de la Reconquista

Circuit Bardenas Reales et grands monastères d’Aragon et de Navarre

(partie 1)

 

 

Ce circuit assez long, au nord de Saragosse, se déroule à saute-frontière entre Aragon et Navarre.

Il permet la découverte de l’extraordinaire région des Bardenas Reales et d’aller à la découverte de quelques-uns des beaux monastères et châteaux, voire les deux, qui fixèrent les territoires reconquis entre les X° et XII° siècles.

 

Jour 1

 L’idéal, que l’on vienne de Pampelune ou de Saragosse est de rejoindre la NA 134, à proximité de Tudela* et d’aller à Arguedas, point de départ idéal pour la visite des Bardenas reales. L’entrée du Parc Naturel, à moins d’un km au sud d’Arguedas, sur la NA 134, est assez peu fléchée, curieusement une petite route d’environ 4 km mène au moderne Centre d’Informations du site. De là, seule une piste bien praticable et balisée en bleu permet le déplacement des véhicules à moteur.

D’autres itinéraires sont aménagés pour les VTT et les randonneurs. Sur plus de 40 000ha, cet espace unique, classé réserve de la biosphère, offre un territoire semi-désertique aux reliefs tranchés, parcouru de canyons profonds et couronné de cheminées de fées et de grandes tables rocheuses. Ce vaste paysage inhabité évoque tout autant la Cappadoce que les grands déserts américains mais en conservant une dimension appropriable, un peu à la manière du Causse Méjean. C’est un lieu très fort qui demande à être parcouru tranquillement pour en apprécier toute la diversité. La traversée en voiture ne permet d’en voir que la partie centrale, La Blanca, Baja et Alta, le nord étant occupé par El Plano, plateau alluvial élevé, le sud de la zone se terminant sur la Plana de la Negra. Néammoins, la vingtaine de kilomètres à parcourir sur les pistes autorisées offre une diversité de paysages admirables et ne peut qu’inciter à revenir en se débarrassant, cette fois, de tout engin motorisé et de se consacrer à la découverte de cette fantastique contrée par le seul usage de ses jambes ! On quitte donc ce fascinant territoire en rejoignant la petite commune de Carcastillo par la NA 534 que l’on récupère à gauche, au sortir de la piste. Dans Carcastillo, prendre à gauche la NA 5500, en direction du Monastère de la Oliva.

Monastère de la Oliva

Symbole de la reconquista, au même titre que Fitero et Leyre, le monastère de la Oliva  fut édifié par les cisterciens à partir de 1149. Il tire son nom d’un olivier au pied duquel vint mourir un roi navarrais, blessé au cours d’une bataille contre les arabes. Simple et austère, comme le veut la règle de Citeaux, l’abbatiale, achevée à la fin du XII° siècle comporte 3 nefs en croix latine dans un plan d’une grande harmonie, première expression avec l’abbatiale de Fitero de l’architecture ogivale en Espagne. L’élégant cloître gothique (XIV°) offre une salle capitulaire, avec un mobilier en place,dans le parfait respect des canons cisterciens, les voûtes reposant sur 4 fortes colonnes à chapiteaux.

Quittant Carcastillo, on suit la NA 5311 après Murillo el Fruto pour rejoindre à une vingtaine de kilomètres la bifurcation qui mène, à droite, à Ujué.

 Ujué

Ce village est perché sur un promontoire qui domine une grande partie de la Ribera et permet d’admirer un exceptionnel panorama. Non moins exceptionnelle, il faut consacrer le temps nécessaire à la visite de la forteresse sanctuaire Santa Maria qui domine le village. Celle-ci occupa une position stratégique lors de la reconquista, dès le IX° siècle, en faisant un poste avancé en terre musulmane. L’édifice actuel fut édifié à la fin du XI° siècle avec la participation du Roi Sanche Ramirez. On y voit les premières apparitions de sculptures romanes, en lien avec les réalisations du sud-ouest de la France et du nord-ouest de l’Espagne, dans l’esprit d’itinérance de ce que l’on dénommera l’art des pèlerinages. C’est au début du XII° que l’art roman trouve son accomplissement en Navarre grâce aux interventions de Maître Etienne, architecte de Santiago et probablement de son atelier dans la décoration de la façade de san Salvador de Leyre que nous visiterons le deuxième jour. L'église fortifiée Santa María se dresse donc sur les hauteurs du village médiéval d'Ujué. Son nom évoque la légende de la colombe (Uxua en basque) : un berger, surveillant ses troupeaux, eut l’apparition d’une colombe entrant et sortant par la fente d’un rocher. S'approchant, il y découvrit une statue de la Vierge. Les habitants du village, pour l'abriter, bâtirent une église qui fut peu à peu absorbée par les  constructions qui l'entourent et la dissimulent.
Protégée par des tours crénelées (Cuatro Vientos et los Picos), ceinte d’un chemin de ronde et de solides contreforts santa Maria d’Ujué se pare de l’allure unique d’une forteresse militaire.
Il s'agit aujourd'hui d'un important sanctuaire marial, monument national qui a fait et fait encore l'objet d'importants travaux. Ses splendides galeries, sa grande nef gothique, son chevet roman et ses deux portails en font l'un des joyaux du village. Le portail nord, plus sobre, est décoré de scènes très descriptives. Le portail sud ou principal, chef-d'oeuvre de l'art gothique mérite de s'y attarder.

 

D’Ujué, on reprend la sinueuse mais excellente route de l’aller jusqu’à retrouver la direction d’Olite, sur la droite (NA 5310) que l’on va rejoindre en passant par le village médiéval de San Martin de Unx, dominé par l’église Saint Martin de Tours (XII°), charmant exemple du style roman navarrais.

 L’étape a été longue et l’on se réjouit de parvenir à Olite pour y faire étape et séjourner au coeur de la petite cité dans le Parador installé dans le “vieux château“.

 

 

 

Jour 2

 


 

Olite

Chef-lieu du district du même nom, Olite est située au centre de la province de Navarre. La cité, d’origine romaine conserve encore une partie de son enceinte sur laquelle a été érigé le “vieux château“ qui fut lieu de résidence des monarques de Navarre. Sortant du Parador par la place des Teobaldos, on arrive de suite, sur la gauche, à l’église Santa Maria, de style gothique (XIII°) et ornée d’un portail particulièrement riche. De part et d’autre, des niches accueillent les statues de apôtres. Franchissant le passage couvert, on débouche sur la Plaza de Carlos III. De là, portant le regard sur la gauche se révèle le château (XV°) partiellement édifié ou restauré par un roi d’origine française, Charles III le Noble. Cet ensemble admirable, couronné de nombreuses tours semble sorti d’un conte de fées. De la Plaza de Carlos III, prendre, au centre, la rue Mayor aux nombreuses façades ornées d’écussons des familles dominantes de la cité. Tourner à gauche dans la rue de San Pedro permet de rejoindre l’intéressante églis du même nom. Edifice de transition faisant passage entre le roman et le gothique, on appréciera le beau portail de la première période cependant que l’œil est attiré par l’élégante flèche de la tour gothique de l’Aiguille.

On quitte Olite à regret en prenant la direction de San Martin de Unx pour rejoindre par la NA 5303 puis la NA 132 la petite ville de Sangüesa (fondée en 1122 par Alphonse 1er le Batailleur) qui mérite une étape pour rendre visite à l’église de Santa Maria la Real et apprécier son impressionnant portail. Une promenade dans la calle Mayor révèle maisons princières et palais du XVI° siècle. La route se poursuit par Javier couronnée d’une impressionnante forteresse érigée entre le 11° et le 13° siècle. On arrive à Yesa par la NA 5410 pour franchir la N240 et suivre la direction du


 Monasterio de Leyre.

Edifice fondateur du premier âge roman et dont  l’importance fut reconnue dès 848, le monastère San Salvador de Leyre fut considéré par Sanche le Grand comme le centre et le cœur de son royaume. Il servit de refuge au Roi et aux évêques lors des invasions musulmanes, en particulier en 924 quand Abdherraman III détruisit Pampelune. La visite en est très intéressante ; d’une part l’église, romane et gothique, dont le portail, rapporté après la construction de la nef présente un florilège de décorations et motifs romans du XII°, d’autre part la très curieuse crypte à 4 nefs reposant sur de fortes et courtes colonnes, toute à la fois archaïque et puissante.

De Leyre on emprunte la N-240 pour parvenir au monastère de San Juan de la Pena en passant par Puente la Reina, lieu mythique sur le chemin de Compostelle. C’est la petite route HUV 2301 qui grimpe à l’assaut du massif dans lequel est littéralement engoncé le monastère de San Juan de la Pena.


 Monasterio de San Juan de la Pena

Celui-ci est avec le monastère San Pedro de Siresa l’un des deux piliers de la vie ecclésiastique dans l’Aragon naissant. L’abbatiale de San Juan de la Pena fut construite sous un gigantesque rocher en surplomb, faisant abri. Le site, très impressionnant, se compose d’une salle capitulaire, suivie d’une crypte puis de l’église romane. A proximité reposent les premiers rois d’Aragon dans un paanthéon qui fut réaménagé au XVIII) siècle. Enfin on accède au cloître du XII°, riche de nombreux et beaux chapiteaux historiés.

En route maintenant pour l’une de ces formidables forteresses qui ont ponctué les frontières au fur et à mesura de la reconquista. Pour se faire, on continue, au départ du monastère par l’A 1603 jusqu’à Bernues où l’on prend, à droite, l’A 1205 qui mène à Triste, au dessus d’un vaste plan d’eau. Prendre, à gauche la direction de Huesca (A 132). Chemin faisant, on découvre l’exceptionnel ensemble des Mallos de Riglos, énormes formations géologiques verticales hautes de plus de 300m qui jaillissent au dessus de la vallée.

Arrivé à Ayerbe, tourner à gauche en direction de Loarre et de son château.

 Château et monastère de Loarre

Forteresse romane la plus importante d’Aragon et de la péninsule ibérique, le château de Loarre est édifié sur le site d’un ancien castrum romain (altitude 1070m) depuis lequel la vue est époustouflante !

Couvrant une surface d’un hectare, la forteresse fut bâtie par campagnes successives (1020-1035) d’abord pour sa destination militaire puis, vers 1070, pour sa fonction monastique sous la direction du roi Sanche Ramirez. Loarre vit également l’éclosion du second âge roman avec l’édification d’une vaste église à deux étages précédée d’un portail (1095) et enrichie d’élégants chapiteaux inspirés du style employé à Saint-Sernin de Toulouse. Ce lieu d’une grande richesse et d’une diversité architecturale rare dans ce type d’édifice invite à la déambulation et à la contemplation.

Il faut maintenant rejoindre Sos del Rei Catolico, l’étape de ce soir après une journée bien occupée. D’Ayerbe, on prend l’A 1202, petite route sinueuse qui traverse de beaux paysages pour parvenir à Uncastillo et de là, tourner à droite pour arriver à SOS où nous attend un Parador d’excellente qualité.

 

Fin de la première partie

Une seconde séquence sera prochainement consacrée à cette intéressante région à cheval sur Aragon et Navarre et nous porterons un intérêt appuyé aux Cinco Villas, découverte que nous dirigerons à partir de Sos del Rei Catolico.

 

 

 

 

* Si cela est possible, à 25 km à l’ouest de Tudela, est situé le remarquable monastère de Fitero. Fondé en 1140 et convoité par rois, évêques et seigneurs, le Monastère de Fitero peut se vanter d´être le premier couvent cistercien construit dans la Péninsule Ibérique. Malencontreusement, il ne peut se visiter, par l’intermédiaire de l’Office de Tourisme, qu’à 12h00 précises….ce qui n’est pas toujours aisé à conjuguer dans le déroulé d’un périple. Ce fut le cas pour ce déplacement et je le regrette car le site semble du plus grand intérêt. www.fitero.org