Barcelone, complément d'enquête...

 

Barcelone, comme beaucoup de villes complexes, nécessite de nombreuses visites pour en appréhender toute la diversité et la richesse architecturale.

Ce court séjour à pour motif de s'intéresser au Park Güell et à la Sagrada Familia pour approcher d'un peu plus près les personnalités d'Eusebi Güell et d'Antoni Gaudi.
Un prochain séjour permettra la découverte du Palais Güell et de la colline de Montjuich.
Barcelone est une ville un peu brouillonne qui s'apprécie à petites doses...

Jour 1
Le point de départ se situe à l'hôtel Passeig duel Gracia, situé à l'angle de la prestigieuse avenus du même nom et de la carrer Rosselló. Hôtel simple et sans prétention, il présente l'immense avantage d'être à 50 m de la casa Milà (la pedrera) et, franchement, y prendre son petit- déjeuner dans le calme des volutes gaudiennes et à l'abri du comportement débile des hordes touristiques asiatiques, cela vous change la journée à venir. De plus, on a à portée de main la " Manzana de la Discordia", que demander de plus...  
Direction le Park Güell en remontant jusqu'à son extrémité le Passeig del Gràcia qui va s'étrécissant rejoindre la Travesia de Dalt que l'on suit sur le droite pour ensuite attaquer la colline du mont Carmélites où se situe le Park en remontant l'avenue del santuario de San José de la Montana. On longe l'hôpital puis de sympathiques escaliers roulants finissent le travail jusqu'au sommet de la butte pour nous amener calme de Olot au lieu de notre visite. Là, pas le choix, sauf à décaler au maximum les horaires en fonction de l'ouverture du Park, c'est noir de monde !
Oublions la foule et intéressons-nous au lieu ; le Park, à son origine, aurait dû être une cité-jardin. D'autres cités-jardins sont connues en Catalogne, comme à Olot, " L'Eixample Malagrida". Eusebi Güell (1846-1918), riche industriel, spécialiste en particulier dans la confection des velours, était le fils d'un "indien", comme on disait alors. Son père, Joan Güell avait fait fortune à Cuba avant de revenir s'installer à Barcelone. Eusebi qui avait fait de belles études, et n'était pas sot, sut faire fructifier l'héritage paternel et devint l'un des industriels les plus puissants de la fin du siècle. Son goût développé pour les arts le conduira à se comporter en authentique mécène, entretenant tout au long de sa vie une relation d'exception avec l'architecte Gaudi, l'associant à la plupart de ses réalisations, maisons, immeubles, palais et même cité ouvrière avec la Colonià Güell, forme d'utopie moderniste, à Santa Clara de Carvello. De fortes convictions religieuses unissaient également les deux hommes mais chacun gardait sa liberté d'action et de pensée.
Pour exemple, alors que les critiques étaient nombreuses à propos des réalisations engendrées par le tandem, Gaudi dit à Güell : " j'ai parfois le sentiment que nous sommes les seuls à aimer cette architecture... Et Güell de répondre, Je n'aime pas votre architecture, je la respecte....".
Eusebi Güell fut anobli en 1911 par le roi Alfonso XIII et devint Comte de Güell avant de décéder en 1918 dans la maison qu'il occupait au Park Güell. Gaudi lui survivra jusqu'en 1926, totalement absorbé par l'œuvre de sa vie, l'édification de la Sagrada Familia. La fin de son existence sera compliquée et misérable, l'artiste s'étant peu à peu coupé du monde pour vivre pleinement une sorte de "mysticisme architectural".
Il vit alors modestement et, si sa réputation est établie, il mourut quasiment inconnu, renversé par un tramway en 1926. Personne ne le reconnut alors et il mourut ignoré de la plupart, à l'hôpital. Il aura quand même droit à des funérailles quasi nationales qui rassembleront une foule immense venue saluer sans doute autant le nationaliste ardent que l’architecte exhubérant…
De Gaudi, nous ne reviendrons pas sur les réalisations majeures déjà commentées dans d'autres circuits. C'est le Park Güell qui nous intéresse aujourd'hui.
Ce qui aurait dû être une remarquable Cité-Jardin, à l'image de Port Sunlight ou de Letchworth en Angleterre ou du Chemin-Vert, en France ne sera finalement qu'une sorte de jardin d'agrément de 15 ha s'inscrivant sur les hauteurs du Mont Carmélites, dominant le village de Gracià, tout juste absorbé par la tentaculaire Barcelone.
De ce lieu, l'image emblématique du balcon orné de fragments de mosaïques est devenu signature du modernisme et de l'œuvre de Gaudi à Barcelone ; amusant quand l'on sait que ce fut Jujol, collaborateur de Gaudi qui en fut le réalisateur.
Bien plus intéressant est le concept d'ensemble de la Cité-Jardin qui aurait dû compter 40 maisons (ce qui est bien peu...) s'égayant dans la parc autour de l'espace couvert aux étonnantes colonnes, initialement destiné à accueillir un marché-couvert ; la lecture en est alors toute autre. Encore plus intéressantes sont les circulations couvertes, fondues dans l'environnement, parfaite synthèse entre minéral et végétal (ici, les chapiteaux palmiformes prennent tout leur sens, rivalisant avec les palmiers qui les environnent).
Seules deux des maisons prévues furent édifiées, Gaudi vécut dans l'une d'elles.
La famille Güell à fait don du Park à la ville de Barcelone en 1923.
Quittant le park on redescend en ville par la calle de Sardenya pour aller faire une visite de chantier à la Sagrada Familia...
Cette réalisation, toujours en cours d'édification, consuma littéralement le génie çréatif de Gaudi dans les dernières années de sa vie et reste un immense chantier à ciel ouvert.
Entreprise en 1882, la construction fut reprise en 1883 par Gaudi qui remania radicalement le projet néo-gothique initial. Pendant plus de 40 ans, Gaudi fera de cette réalisation consacrée à la Sainte Famille, l'unique et l'ultime but de sa vie, tant sur le plan mystique que sur le plan architectural.
Il en résulte un manque de lisibilité et un hermétisme qui ne facilitent pas la compréhension de l'œuvre. La façade de la Nativité, due à Gaudi, présenté une surcharge de sculpture et d'ornementation dans laquelle l'œil a bien du mal à se fixer ; de toute évidence, Gaudi poursuivit là un but qu'il était seul à connaître et surtout  à pouvoir décrypter. Cela en fait un monument étonnant mais il n'est pas certain que de l'étonnement seul procède la grande architecture...
Au final, les excès, mêmes géniaux de Gaudi ne mènent nulle part et, surtout, ne firent pas école, peut-être la pire des sanctions...
En prolongement, vers le nord, en partant de la Sagrada Familia, se trouve l'hôpital San Pau dû à Montaner, édifice remarquable sur lequel on retrouve nombre de références déjà remarquées sur le Palais de la Musique Catalane, du même artiste. Nous irons à l'hôpital, la prochaine fois.
Barcelone est une ville trépidante qui réclame de prendre du repos pour la mieux apprécier.

2ème jour


Le lendemain matin, proche du Passeig de Gracià, on peut, avec avantage, rendre visite au récent Muséum del Modernisme Català, c/Balmes. Sur 1000m2, ce musée exclusivement consacré à l'origine du Modernisme Catalan, regroupe mobilier, peintures, sculptures, céramiques, vitreries de cette période passionnante qui va de 1885 à 1910, environ. Dans une atmosphère intime et raffinée, on approche de très près les œuvres d'artistes souvent méconnus qui ont participé aux côtés des plus grands à ce vaste élans créatif.
Au sortir de ce passionnant musée, une pause dans une bodega fera le plus grand bien avant de quitter Barcelone dont il faut savoir ne pas abuser avant d'en être lassé...
On y reviendra, de toutes façons, aussi peut-on mettre le cap vers la côté pour se nettoyer les poumons et profiter des belles lumières de l'hiver ; direction Aiguablava, minuscule point sur la côté sur lequel est ancré, surplombant la mer, un parador contemporain des plus agréables et particulièrement bien tenu.
Avant de rejoindre cette étape de grande qualité, on passera par Begur, bourgade fortifiée, encore couronnée d'un château en ruine. Ensuite, avant d'aller au Parador, il faudra descendre au minuscule village d'Aiguablava pour y découvrir son adorable petit port enserré dans les criques majestueuses.

Le troisième jour, celui du retour sera consacré à une agréable déambulation dans les charmants villages que sont Pals, Peratallada, Toroella de Montgris ou encore San Marti d’Empuries.